mardi 12 février 2008


Voilà une semaine que nous sommes arrivés en Inde. Une semaine riche en sensations et émotions, longue comme un mois, fatigante aussi. Évoluer dans Bombay* requiert une certaine élasticité des sens : à croire que le vacarme des klaxons, le tourbillon des odeurs, le bouquet d’épices fleurissant les mets locaux, et l’incessante agitation générale sont autant d’offrandes faites par les 15 millions d’habitants de la ville à un éventuel Dieu du Chaos ! Pourtant, cette déferlante de vie est enivrante à souhait. Rien de tel qu’une ballade à pied pour se laisser subjuguer par les marg (souk en hindi) débordants de monde comme de couleurs, faire une pause chaï (thé bouilli dans du lait avec sucre et épices) en observant des chèvres faire une sieste, ou tenter de se frayer un chemin dans la fourmilière de taxis jaunes et noirs.
Indéniablement, notre adaptation à Bombay a été facilitée par Savitri, notre ingé’ son et coordinatrice de production, qui, depuis le premier soir, nous guide avec enthousiasme et intelligence dans sa ville natale.


Nous louons une chambre dans une résidence située derrière la Magen David Synagogue, un bel édifice bleu pastel, légèrement délabré mais à la simplicité apaisante. Les deux bâtiments sont au cœur du quartier à majorité musulmane de Byculla et presque tous les soirs, des fidèles de Mahomet se marient derrière le temple juif.
Cette première semaine a été consacrée à la rencontre des personnes dont nous avions déjà les contacts, principalement des leaders de la communauté et des membres d’organisations juives internationales:

  • Sharon et Sharona Garsulkar nous ont invité à fêter shabbat chez eux, pour les kiddush du vendredi soir et samedi midi. Parents de deux petites filles de 4 et 2 ans, ils sont inquiets pour leur avenir. Ayant tous deux étudié dans des yeshivot en Israël, ils sont très pratiquants et ne pensent pas que leurs filles pourront bénéficier d’une éducation religieuse adéquate en Inde.
  • Ralphy Jhirad, homme d’affaires influent, croit au contraire que les Bene Israel restés en Inde ont fait le bon choix, alors que leur pays devient un des moteurs économiques du monde. Il nous a invité au mariage de sa nièce, ce qui fût pour nous l’occasion d’assister à un étonnant mélange de coutumes juives et de culture indienne.

  • Dans la synagogue Shaar Harahamim, la plus vieille de Bombay (1796),nous avons participé à une Malida. Lors de cette cérémonie typiquement Bene Israel, on célèbre le prophète Elie en partageant un plateau de fruits et de riz sucré. L’intendant de la synagogue, Elis Salomon, nous a parlé de ses amis Hindous et Musulmans et de son attachement à l’Inde.

  • L’Organisation for Rehabilitation through Training (O.R.T.) et le Joint Distribution Committee (J.D.C.) sont deux organismes américains dont le but est de développer des programmes éducatifs et culturels pour la communauté juive. Malgré quelques jeunes Bene Israel, ce sont essentiellement des personnes âgées qui répondent présent à leurs invitations.


Émouvants et enrichissants, ces premiers pas ont ouvert la voie à de nouvelles rencontres. Dès mercredi, nous prendrons le bateau pour Alibag, village près duquel ont naufragé les ancêtres des Bene Israel.


* Mumbai depuis 1995.